Emmanuel Kattan
Une (pseudo) reine à New York
Emmanuel Kattan
Boréal, 168 pages
La Presse
New York a été utilisé à toutes les sauces dans les arts, au cinéma comme dans la littérature. Emmanuel Kattan le sait bien, et il ne voulait surtout pas tomber dans les clichés en utilisant la ville américaine comme toile de fond de son troisième roman.
Dans
, la High Line est ainsi considérée comme « trop touristique » et les scènes dans Central Park se déroulent en retrait, sur Cedar Hill. L’idée était donc de ne pas montrer les lieux qu’on voit dans toutes les comédies romantiques américaines et de sortir du parcours obligé.Écrire sur New York aura aussi permis à Emmanuel Kattan de s’approprier un peu la ville dans laquelle il vit depuis huit ans – il a travaillé à l’ONU et est actuellement en poste au British Council – , et où il est difficile « de trouver sa place propre ». Résultat : ce nouveau roman est probablement le plus personnel de l’écrivain et philosophe, parce qu’il y décrit les lieux qui le touchent et qui sont liés à ses souvenirs.
« En arrivant à New York, j’ai cherché instinctivement des petits recoins, des squares cachés, et j’ai essayé de faire découvrir ça aux lecteurs, explique Emmanuel Kattan, qui a fait un court passage à Montréal la semaine dernière. Pour les deux personnages, ces lieux deviennent des traits d’union qui leur permettent de se rencontrer. »
« New York peut nous absorber complètement ou nous rejeter. Soit on est intégré dans ce ventre truculent et coloré, soit on est expectoré par la ville. »
Dans
, Rick Boisvert, un peintre québécois qui a connu du succès à New York pendant les années 80, croit dur comme fer qu’il a repéré la reine Élisabeth se promenant incognito dans Manhattan. Celle-ci, authentique New-Yorkaise, décide de jouer le jeu. Ils se reverront donc régulièrement, le temps que Rick fasse le « portrait de la reine ».« J’ai essayé de traduire dans ce livre un certain amour pour la ville, qui est ma propre affection, mais aussi celle qui se développe entre les deux personnages. Alors qu’ils n’ont rien en commun, ils s’apprivoisent, apprennent à s’aimer et à aimer la vie à travers le regard de l’autre. »
Pour Emmanuel Kattan,
est non seulement l’histoire d’une rencontre, mais une histoire d’amour « un peu insolite », comme toutes les histoires d’amour. « Quand on tombe amoureux, c’est toujours avec l’étranger, et en même temps avec quelque chose de familier. Le miracle, c’est cette juxtaposition de la différence absolue et de la familiarité, qui crée une espèce de tension et de remous en nous. »Cette rencontre devient aussi un prétexte pour les deux personnages de faire leur bilan, et leur permet d’entrevoir la possibilité d’un nouveau départ. « Même à 60, 70 ans, on peut faire ça. C’est l’espoir qu’il y a dans le roman. Avec de l’imagination, et aussi avec de l’amour – parce qu’il n’y a pas d’amour sans imagination on peut recommencer quelque chose, et quelque part se racheter vis-à-vis de soi-même. »